De l'hibernation
Ca ne m'était pas arrivé depuis quelques années. Pas vraiment, pas à ce point-là. Pas depuis le lycée, je crois. Ce truc qui te tombe dessus au-début de l'hiver, aux premiers froids, aux premiers matins de brouillard, aux premières grisailles. Ce poids mou, qui t'enveloppe et émousse un peu le contour des choses alentours.
Ces dernières années, le froid et la baisse de luminosité avaient tendance à me déprimer. Là, non, pas vraiment. Je ne suis ni déprimée, ni vraiment bien. Je flotte un peu entre les deux, selon les moments. J'ai du mal à sortir de chez moi. Je fais des choses, et je n'en reste pas marquée. Il y a un moment, j'ai dû faire un effort pour me rappeller que les photos au parc Montsouris, c'était avant-hier, seulement. Je travaille un peu ou bien ou selon les moments, et je n'en retire que l'impression désorientantede n'avoir rien fichu, sans bien savoir pour autant où sont passées mes journées. J'ai dormi, peut-être? Pas tant que ça, pourtant. Je ne sais pas trop. J'ai parlé, mais je ne sais pas bien de quoi. J'ai chanté, je crois. Mais quoi?
Je dis souvent que je suis "molle", c'est un des mots par lesquels je m'autocaractérise le plus. Mais là, je me donne l'impression d'être ... malléable. Déformable, étirable, compactable. Pesante et légère à la fois. Entre-deux. Au ralenti. Ou en filigrane de moi-même, à me regarder faire d'un peu loin. Ce n'est pas spécialement désagréable, au fond. J'ai bien de temps en temps un coin du moi (qui fais les choses) qui dit au moi (qui regarde) de sortir de sa torpeur et de se bouger les fesses, de participer à l'effort général, sans trop de résultat pour l'instant. J'espère que je ne vais pas continuer à patauger dans de la barbapapa pendant les trois mois qui viennent, quand même... J'ai beau avoir l'air à peu près normale de l'extérieur, je sens bien que je ne suis pas au mieux de mon efficacité, et la montagne de choses à faire d'ici là me fait un peu peur.
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Les mots sur la musique
"j’ai comme qui dirait la boule
un coup d’froid dans mon cool
un coup d’vent une houle
un coup d’gel dans mon pull-
over
j’ai comme qui dirait du mal
dans ma tête une balle
de ping-pong anormale
un coup d’froid dans mes malles
d’osier
j’ai comme qui dirait du blues
à en sucer mon pouce
à rêver d’eau de source
sur des tapis de mousse
bleue
j’ai comme qui dirait un cil
dans ma crème dans mon île
flottante indélébile
coup d’ciseaux dans mon fil
à plomb."
Coup de froid, Isabelle Mayereau